Ce 28 février, la commission d’enquête du Parlement européen concernant les mesures des émissions dans le secteur de l'automobile (EMIS) adoptait un rapport conclusif, après près d’un an d’enquête sur le scandale des émissions automobiles. Le texte comprend des recommandations pour éviter à l’avenir de nouvelles fraudes aux émissions.

Le rapport conclu qu’étant donné que les voitures étaient construites pour réussir un essai en laboratoire périmé et non des essais sur route, les constructeurs automobiles ont réussi à cacher pendant des années les émissions excessives des voitures diesel en conditions réelles. Bien que la Commission prétende ne pas avoir eu connaissance de comportements illégaux, le rapport conclut que la communication interne entre services de la Commission révèle des informations sur le ‘hard cycle beating’*, une indication claire de l’utilisation éventuelle de dispositifs de mise en échec. Toutefois, la Commission n’a lancé aucune enquête en la matière. De leur côté, les États membres n’ont pas appliqué la législation de l’UE concernant les émissions automobiles, et ils ne se sont pas soucié de savoir pourquoi les voitures qu'ils avaient homologuées polluaient beaucoup plus sur la route qu'en laboratoire. De plus, la mise en œuvre d’un nouvel essai en conditions réelles a été reportée, parce que les intérêts industriels ont prévalu sur les préoccupations sanitaires et environnementales.

Dans ces conditions, la commission d’enquête recommande, entre autres, les actions suivantes pour prévenir toute fraude à l’avenir : renforcement du processus de réception par type de l’UE et du rôle de la Commission en la matière, création d’une agence européenne de surveillance automobile.

Seb Dance, eurodéputé et porteparole S&D pour le scandale du Dieselgate, a déclaré ceci :

« Le verdict est clair : la mauvaise gestion et la négligence ont permis à l’industrie automobile de frauder à grande échelle. Même après l’éclatement du scandale, le lobbying industriel a convaincu plusieurs États membres de l’UE de retarder et affaiblir les nouveaux essais d’émissions en conditions réelles. Ils veulent ainsi permettre, entre 2017 et 2020, une pollution automobile supérieure de plus de deux fois à la limite légale, et supérieure de 50 % après 2020. »

« Les États membres n’ont pas contrôlé la légalité du niveau d’émission des automobiles. Ils ont fermé les yeux sur la fraude aux essais commise par VW et d’autres constructeurs. La Commission n’a pas fait appliquer la législation promulguée par elle-même. Ce faisant, elle a érodé la confiance des consommateurs dans l'industrie automobile et mis en danger la santé publique. »

« Aujourd’hui, les pays de l’UE ont l'occasion unique de redéfinir le système de réception par type, pour garantir la propreté des véhicules, non seulement dans des conditions de laboratoire, mais aussi sur route. Les États membres ne doivent pas ignorer le signal fort envoyé ce jour par le Parlement européen. Et les pays qui continuent à bloquer le renforcement de la surveillance des marchés à l’échelle de l’UE doivent cesser de placer les intérêts de l’industrie automobile nationale au-dessus de ceux des consommateurs et citoyens. »

Christine Revault d’Allonnes Bonnefoy, eurodéputée et rapporteuse fictive S&D, a ajouté ce qui suit :

« Après le Dieselgate, on ne peut pas juste continuer comme si de rien n’était. Dans ces conditions, les Socialistes & Démocrates demandent le renforcement de la surveillance : il faut créer une agence européenne indépendante de surveillance automobile. En effet, le Dieselgate a pu se produire parce que les États membres n’ont pas surveillé le respect par les constructeurs automobiles de la législation sur les émissions, et parce que le droit de l’UE n’est pas appliqué également à travers l’Union. En conséquence, nous voulons que l’UE soit capable d’effectuer des essais et des investigations sur les voitures, y compris par essais surprise. Il s’agit de s’assurer que les États membres et les constructeurs automobiles font bien leur boulot – et, dans le cas contraire, de pouvoir leur retirer les réceptions par type. En effet, l’UE doit se doter des moyens pour améliorer la santé publique et protéger l’environnement. Par ailleurs, en s’engageant à fond dans la protection des intérêts des citoyens, le Parlement européen, seule institution européenne élue directement, envoie un signal important aux citoyens. »

Les recommandations pourront encore être amendées lors du vote en plénière, prévue lors de la session d’avril du PE à Strasbourg.

*NdT : cycle beating : « pratique de certains constructeurs consistant à réaliser des cycles d'essai dans des conditions ne reflétant pas les conditions réelles de conduite de façon à contourner les exigences relatives aux valeurs limites d'émissions » (source : IATE).
hard cycle beating : « utilisation des conditions des cycles d’essai pour activer le contrôle d’émission (et non pas uniquement pour négliger la stratégie de contrôle des émissions hors condition d’essai) » (source : euobserver.com)

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